COLLECTION CHATEAUX ET CATHÉDRALES


1 LP - STU 70 313
L'OPERA DE LULLY EN LA COUR DE MARBLE - VERSAILLES




UNISSANT LA DANSE ET LA MUSIQUE LULLY CRÉE L'OPÉRA FRANÇAIS POUR LE GLORIEUX PLAISIR DU ROI-SOLEIL




Jean-Baptiste Lully (1632-1687) ISIS (1677) L'opéra des musiciens
--' --" A

 - 1. Prologue


 - 2. Acte II, scène 7: duo des Nymphes


 - 3. Acte IV, scène 1: chœur des trembleurs


 - 4. Acte V, scène 1: Rondeau, plainte de Io


 - 5. Acte III, scène 3 à 5


 - 6. Acte III, scène 6


ARMIDE (1686) L'opéra des dames
--' --" B

- 1. Ouverture


- 2. Acte II, scène 2: duo d'Armide et Hidraot


- 3. Acte II, scène 3: Le sommeil de Renaud


- 4. Acte II, scène 5: Monologue d'Armide


- 5. Acte V, scène 2: Passacaille




 
Nadine Sautereau, soprano CHORALE PHILIPPE CAILLARD
Jocelyne Chamonin, soprano ORCHESTRE JEAN-FRANÇOIS PAILLAR

André Mallabrera, ténor Jean-François Paillard, Direction
Roger Soyer, basse

 






Luogo e data di registrazione
-

Registrazione: live / studio
studio

Producer / Engineer
Guy Laporte


Edizione LP
Erato - STU 70 313 - (1 lp) - durata --' --" - (p) 196? - Analogico

Note
-











On pourrait à juste titre s'étonner d'une curieuse disproportion entre deux manifestations de la renommée de lully: son nom est indissolublement associé à la gloire de la cour de Versailles, il est même le seul que connaissent la plupart des "honnêtes hommes" en fait de musiciens du Grand Siècle; son rôle essentiel de fondateur de l'opéra français a été analysé par tous les musicigraphes, les détails de sa vie "illustre et libertine" ont suscité une littérature abondante; et pourtant, à une époque où le disque a remis en honneur Delalande, Charpentier, Campra, la musique de Lully reste pratiquement inconnu. Quelle en est la raison?
Il semble qu'il faille chercher la réponse en premier lieu dans le fait qu'il s'agisse d'une oeuvre axée tout entière sur le théâtre. Si l'on feuillette les catalogues de disques, on constate que les quelques motets de Lully connaissent la faveur des éditeurs. Mais enregistrer un opéra est une tout autre entreprise; rameau en pâtit également, bien que sa musique soit d'une valeur incontestablement très supérieure, et tellement plus proche de notre sensibilité moderne! Il faut bien constater que la parie essentielle de l'opéra de lully, à savoir le récitatif, ne nous touche plus guère. Les traditions d'interprétation, si essentielles en ce domaine, ne sont perdues. La chose ne date pas d'hier; en 1732, déjà, l'abbé du Bos écrivant: "Ceux qui ont vu représenter les opéras de Lulli... lorsque Lulli vivoit encore et quand il enseignoit de vive voix à des acteurs dociles ces choses qui ne sauralent s'écrire en notes, disent qu'ils y trouvoient une expression qu'ils n'y trouvent plus aujourd'hui."
Maintenant que prés de trois siècles ont passé, peut-on espérer retrouver ces traditions mortes? La seule chance d'y parvenir peut-étre se trouverait sur les planches, dans la collaboration suivie de véritables acteurs et de musiciens avertis... mais led qualques réalisations hâtives et peu respectueuses du texte tentées de loin ne sont d'aucune utilité en ce sens. En attendant d'improbables tentatives, faut-il done renoncer complétement à connaitre l'opéra lullyste?
Nous avons oensé qu'une solution partielle pourrait se trouver dans la publication de "morceaux choisis", qui ne soient pas seulement des suites d'orchestre, mais un vrai échantillonnage de symphonies, de récitatifs, d'airs et de choeurs.
ISIS, créé à la cour le 5 janvier 1677, a reçu le surnom de "l'opéra des musiciens". A la vérité une critique sournoise se cache sous cette désignation: les contemporains ont entendu par là qu'il s'agissait d'une oeuvre "savante", plus faite pour les spécialiste que pour le grand public. Nous nous réjouissons, quant à nous, de cette attention particulière de Lully, pour la substance proprement musicale de son opèra - attention qui se manifeste par l'impotance des "simphonies" et des choeurs, et par la richesse de l'instrumentation. La Fontaine le constate amèrement:
            Il faut vingt clavecins, cent violons pour plaire.
Mais ses réserves mêmes nous montrent qu'en réalité l'opéra avait tout pour flatter le Roi Soleil:
            Ses divertissements resentent tous la guerre.
            Ses concerts d'instruments ont le bruit du tonnerre
            Et ses concerts de voix ressemblent ceux éclats
            Qu'en un jour de combat font les cris des soldats (A.M. de Niert)
On conviendra certainement que la majesté du Prologue (extrait n° 1 ), avec le fracas des cuivres, la vigueur des choeures syllabiques et les allusions non dissimulées à la grandeur du roi, constitue un bel hymne à la gloire de la monarchie fançaise. Le n° 2 (acte II, scène 7), est une gracieuse invitation à l'amour formulée par deux Nymphes entre des épisodes symphoniques. Le n° 3 (Acte IV, scène 1) est la fameuse scène des Trembleurs d'Isis, où l'amusant dialogue des cordes er d'un choeur à trois voix d'hommes imite de manière savoureuse les frissons des "Peuples des climats glacés". Le beau Rondeau n° 4 en fa mineur (Acte V, scène 1) est un dramatique monologue de Io, en butte à la jalousie féroce de Junon. En identifiant la première à Madame de Ludre et la seconde à Madame de Montespan, les courtisans entrainèrent la disgrâce momentanée du librettiste Quinault qui n'y avait sans doute pas entendu malice!
On trouvera ensuite d'importants extraits du III acte qui retrace la célèbre légende de Syrinx et Pan, Le n° 5 débute par un choeur de nymphes en l'honneur de la liberté, suivi de trois pièces instrumentales, un Air des Sylvains et des Satyres, une Marche et un trio d'anches. Le n° 6 s'ouvre sur un double choeur des nymphes et des satyres dans la tradition galante.Syrinx entraine ses compagnes à une partie de chasse; Pan la presse, les Satyres l'entourent. affolée elle se jette dans les eaux et est changée en roseaux dont le vent tire un bruit plaintif, tandis que Pan exhale sa plainte. On dit que c'est en passant près d'un marais et en écoutant les murmures du vent que Lully eut l'idée de cette page remarquable.
ARMIDE, "l'opéra des dames", est la dernière tragédie lyrique de Lully. Par suite d'une maladie du roi, la première représemtation eut lieu à Paris, à l'académie de musique, le 15 février 1686 et remporta un succès éclatant. Point de fracas, ici, point de digressions, non plus, mais une admirable déclamation, une traduction juste et sobre des sentiments, une réelle sensibilité. Armide est resté en faveur pendant quatre-vingts ans, tant à la cour qu'à la ville, et à travers toute l'Europe.
L'Ouverture, avec son grave en rythmes pointés, son fugato, son grave terminal, ses reprises, est l'un des modèles qu'ont imité pratiquement tous les compositeurs du XVIII siècle.
L'acte II contient les sommets du drame: le récitatif accompagné et le duo incantatoire d'Armide et de son "aide de camp" Hidraot (n° 2), le fameux Sommeil de Renaud (n° 3) - "il semble tissé de silence", a écrit H. Prunières, et le mol accompagnement des cordes en sourdines y évoque merveilleusement le cadre où s'assoupit le héros - et surtout le monologue d'armide "Enfin il est en ma puissance" (n° 4). Le consentement unanime des contemporains le désigne comme le plus beau récitatif français. Corelli, dit-on, l'acait fait encadrer. Rameau lui consacrera une analyse extrèmement fouillée; nous regrettons de ne pas pouvoir reproduire ici ce document de premiére importance qui éclaire véritablement la signification de cette ligne mélodique, de cds harmonies. "Précédemment, dit E. Borrel, elles paraissaient simplettes, dignes tout au plus de l'attention défèrente... maintenant les voici lourdes de sens, expressives, véritablement tragiques."
La Passacaille du cinquième acte, enfin, est un monument orchestral et vocal digne des proportions versaillaises. Il y a peu d'édifices qui atteignent une telle ampleur au XVII siècle.
Jean-François PAILLARD