COLLECTION CHATEAUX ET CATHÉDRALES


1 LP - STE 50 289

CONCERT AU CHATEAU DE SANS-SOUCI A - POTSDAM




EN LA DEMEURE QUE FRÉDÉRICH II SE BATIT, SES MUSICIENS FONT CHANTER LA FLUTE QUE LE ROI VOULUT REINE




Carl Philipp Emmanuel Bach (1714-1788) Quatuor pour flûte, hautbois, violoncelle et clavecin en su bémol majeur 16' 45"
A1

- 1. Allegro · 2. Adagio ma non troppo · 3. Allegretto

Frederic Le Grand (1712-1786) Sonate pour flûte et basse continue en ré mineur 8' 28"
A2

- 1. Andante · 2. Allegro · 3. Presto

Johann Joachim Quantz (1697-1773) Quatuor pour flûte, hautbois, violoncelle et clavecin en ré majeur 7' 58"
B1

- 1. Andante · 2. Allegro · 3. Affettuoso · 4. Allegro

Michel Blavet (1700-1768) Sonate pour flûte et hautbois en mi mineur 6' 30"
B2

- 1. Adagio · 2. Allegro · 3. Affettuoso · 4. Allegro assai

Johann Gottlieb Graun (1698-1771) Quatuor pour hautbois, flûte, violoncelle et clavecin en fa majeur 9' 24"
B3

- 1. Larghetto · 2. Allegro · 3. Siciliano · 4. Allegro




 
QUATUOR INSTRUMENTAL MAXENCE LARRIEU
- Maxence Larrieu, flûte
- Jacques Chambon, hautbois
- Bernard Fonteny, violoncelle
- Anne-Marie Beckensteiner, clavecin Neupert (Mercier-Ythier)
 






Luogo e data di registrazione
-

Registrazione: live / studio
studio

Producer / Engineer
Guy Laporte

Edizione LP
Erato - STE 50 289 - (1 lp) - durata --' --" - (p) 196? - Analogico

Note
-














Alors qu'il b'était que prince hérotoer, le futur roi de Prusse Frédéric II échafaudit dans sa retraite de Rheinsberg des projets d'ordre artistique aussi bien que politique ou militaire. Et c'est ainsi que le château de Sans Souci fut construit par l'architecte Jean-George.Wenceslas von Knobelsdorf (1697-1753), sur une colline à deux kilomètres au nord-ouest de Potsdam, et en même temps que celui de Charlottenburg et qu'un nouvel Opéra à Berlin, immédiatement après l'accension au trône du nouveau souverain en 1740. Six terrasses superposées menaient au château lui-même, conçu dans une synthèse des styles rococo et français et sous l'aspect d'un pavillon sans étages. dans sa résidence favorite, où il devait recevoir J. S. Bach et Voltaire et mourir lui-même en 1786, le roi réunissait cinq fois par semaine ses musiciens dont plusieurs, comme, le flûtiste Quantz, l'avaient servi dès l'époque de Rheinsberg: c'étaient alors autant de concerts semblables à celui que nous vous présentons "aujourd'hui, et colorés surtout par le timbre agile de la flûte. De ces soirées, Carl Philipp Emmanuel Bach et Benda, Quantz et Graun, le roi lui-même, fournissaient notamment la musique!



Second fils musicien de Jean-Sébastien, Carl Philipp Emmanuel Bach arriva à Berlin en 1738, dans l`intention de s`y fixer. Bientôt appelé à Rheinsberg par le prince héritier, il fut engagé par lui comme accompagnateur. Deux ans plus tard, son patron étant devenu souverain, Carl Philipp Emmanuel eut l'honneur, qu`il devait souligner dans son autobiographie, «d'accompagner seul au clavecin le premier solo de flûte que Frédéric exécuta comme roi!
» Le compositeur devait servir Frédéric II jusqu'en 1767, date à laquelle il succéda à son parrain Telemann comme directeur de la musique à Hambourg... Maître dans le domaine instrumental à la fois de la sonate pour clavier, de la musique de chambre, du concerto et de la symphonie, Carl Philipp Emmanuel Bach parla le langage, non pas de la galanterie, mais de l`«Empfindsamkeit», du sentiment selon Rousseau. C'est ce que montrent notamment les deux sonates en trio dédiées en 1751 au comte Guillaume de Schaumburg- Lippe. La première en effet est censée représenter, à l'aide d'indications précises, une conversation entre un «passionné» et un «tendre». Quant à la seconde en si bémol, enregistrée ici, elle est plus classique de facture : Allegro (ma non troppo) initial assez developpé et contrasté, bel exemple de forme sonate; Adagio ma non troppo en sol mineur, expressif et très riche sur le plan harmonique; Allegretto plus insouciant, caractéristique de son auteur par sa complexité rythmique. Frédéric II avait en tant que musicien des velléités et même un talent certain. non seulement d'interprète, mais aussi de compositeur. Nous avons de lui plus de cent sonates pour flûte et clavecin, des concertos, quelques airs d'opéra... Ces œuvres reflètent parfaitement ce qu'aimaítle souverain: la musique italienne, celle de Quantz ou de Graun. Il ne pouvait souffrir, en revanche ni la musique «avancée» de son temps, ni... les chanteurs allemands, dont il comparait aimablement la voix aux hennissements d'un cheval! D'aucuns ont voulu découvrir, dans la musique à lui attribuée, l'aide, sinon la main de son professeur Johann Joachim Quantz. La chose n'est pas impossible, bien que dificile à juger avec certitude... La Sonate en ré (n° 11 de l'édition complète), quoiqu'il en soit, ne pourra manquer de séduire: grâce pastorale de son Andante ampleur et virtuosité de son Allegro à 4/4, humour et concision de son Presto terminal... Le roi s'amuse, et nous aussi!
Une comparaison, d'ailleurs, pourra être tentée avec l'oeuvre qui suit, Quatuor de Quantz justement. Né prés de Göttingen le 30 janvier 1697, Johann Joachim Quantz ne commença à apprendre la flûte, l'instrument qui devait le rendre célèbre et lui valoir la fortune, qu'a l'âge de vingt-deux ans, apres des études théoriques très completes avec, entre autres, Zelenka et Fux. Entré en 1728 au service du prince héritier de Prusse, il devint vite son professeur de flûte avant d'être nommé par lui, en 1741, musicien de chambre et compositeur de la cour. Auteur d'environ trois cents Concertos et de plus de deux cents œuvres diverses destinées à son royal élève, ainsi que d'un très remarquable traité de flûte, Quantz était à Potsdam «le seul musicien a avoir le privilege d'interrompre le monarque, lorsqu'il jouait, par un bravo, exclamation qu'il lançait adroitement chaque fois que le roi était a bout de souffle après un passage difficile» (Geiringer)... Son Quatuor en ré majeur se rattache par sa coupe à l'ancienne Sonata da chiesa: Andante initial faisant fonction d'introduction; Allegro de vastes dimensions, et aux velléités coutrapunliques; Affettuoso à 12/8 essentiellement mélodique, au rythme de sicilienne; Allegro enfin, plus «moderne» que le premier, et bien propre à mettre en valeur la virtuosité des protagonistes.
Si le Français Michel Blavet, natif de Besançon, intendant de la musique du Comte de Clermont, figure sur ce disque, c'est qu'il passa quelque temps à Rheinsberg dans l'entourage du futur roi de Prusse et qu'il eut l'heur de plaire, alors, à cet amateur exigeant. Son «Premier oeuvre, contenant six Sonates pour deux flûtes traversières sans Basse
», fut édité à Paris en 1728. C'est la première de ces Sonates qui est présentée ici, dans une version pour flûte et hautbois. Les deux instruments, au cours de quatre mouvements bien contrastés, s'opposent et se mêlent à merveille: c'est ainsi que l'Affettuoso (troisième mouvement) ébauche d'abord un canon pour adopter, ensuite, une écriture homophone tout aussi habile et charmeuse.
«Leurs noms font l'objet d'un culte à Berlin, et l'on jure par eux plus que par Luther et Calvin... Si une tolérance générale règne sur toutes les confessions chrétiennes, en musique, par contre, celui qui a l'audace de professer une autre doctrine que celle de Graun et de Quantz n'échappe pas à la persécution
»: ainsi s'exprimait, en 1792, dans «The present State of Music in Germany», l'Anglais Charles Bumey... Il décrivait une situation passée, certes, mais qui avait longtemps correspondu à la réalité: Johann Gottlieb Graun fut bien, avec Quantz, le musicien préféré de Frédéric-le-Grand! A la cour, d`ailleurs, travaillait aussi son frère Karl Heinrich, auteur essentiellement de musique religieuse et d`Opéras. Johann Gottlieb, pour sa part, fut surtout apprécié pour ses compositions de chambre, dont la plupart en trois mouvements. Ce n'est pas le cas, toutefois, du Quatuor en fa majeur, qui révèle son auteur comme un digne continuateur de la tradition baroque: Larghetto initial, d'atmosphère élégiaque, avec mélodie au hautbois surtout et figurations harmoniques à la flûte; Allegro de facture plus polyphonique, avec les deux voix supérieures traitées à peu près en égales; Síciliano à 6/8 en ré mineur; Allegro enfin, bref et d'écriture nettement verticale.
Marc VIGNAL

ERATO - Chateaux et Cathedrales