COLLECTION CHATEAUX ET CATHÉDRALES


1 LP - STE 50 249

CONCERT NOCTURNE EN L'HOTEL DE SULLY AU  - MARAIS




LA MUSIQUE D'UN SIÈCLE LUMINEUX ACCUEILLE LES MUSES ET LES DIEUX DANS L'HARMONIE D'UNE DEMEURE





Marc-Antoine Charpentier (1634-1704) Sonate a 8 (Restitution: Jean-François Paillard) --' --" A1

- Grave · Récit de la viole seule · Sarabande · Récit de la basse de violon · Bourée · Gavotte · Gigue · Passacaille · Chaconne


Nuit - Interlude instrumental extrait de "In Nativitatem Domini", Tome IX des "Meslanges" (Restitution: Guy Lambert) --' --" A2
François Couperin (vers 1618 - 1798) Apotheose de Lully (1725) (Restitution: Jean-François Paillard)
--' --"
B



 
Maxence Larrieu, Rémy Cotton, flûtes ORCHESTRE DE CHAMBRE JEAN-FRANÇOIS PAILLARD
Huguette Fernandez, Ginette Carles, violons Jean-François Paillard, Direction
Alfred Lessling, viole de gambe

Bernard Fonteny, violoncelle

Eugen Dombois, luth

Anne-Marie Beckensteiner, clavecin

 






Luogo e data di registrazione
Eglise N.D. du Liban - febbraio 1965


Registrazione: live / studio
studio

Producer / Engineer
Daniel Madelaine

Edizione LP
Erato - STE 50 249 - (1 lp) - durata --' --" - (p) 196? - Analogico

Note
-











Le quartier historique de Marais couvre la rive droite de la Seine, de l'Hotel de Ville à la Bastille. Il doit son nom aux vestiges de l'ancien lit du fieuve qui s'etendait en cet endroit au moyen-age. Les Templiers y établirent leur monastére au milieu du XII siècle. A partir de 1361 le jeune Charles V amènage une "demeure d'esbattement", l'Hotel Saint-Paul et donne ainsiune vigoureuse impulsion au developpement du quartier. Charles VIII transporte sa résidence à l'Hotel des Tournelies ou Henri II rendra le dernier soupir. L'age d'or du Marais est le XVIIsiècle. La cour, en émigrant vers l'Ouest, a laissé de vastes espaces libres sur lesquels Henru IV crée la place Royale (notre place des Vosges), inaugurée en 1612. Les communautés religiouses et les riches particuliers rivalisent d'ardeur dans l'édification des eglises et des hôtels. Cependant la mode de Marais passera assez vite au XVIII siècle et il a fallu attendre ces toutes derniéres années pour que des initiatives hardles - dont le Festival du Marais, avec son succès retentissant, est un des aspects spectaculaires - attirent l'attention sur une des principales richesses artistiques de la capitale.
L'Hôtel de Sully, sis 62 rue Saint-Antoine, offre un bel exemple des surprises que réserve une restauration intelligente. Le portail, fianqué de deux élègants pavillons était encore, il y a peu de temps, recouvert d'un edifice moderne qui rendait la façade méconnaissable. Remise en son état primitif, elle se révele aujourd'hui une des plus belles du quartier. L'Hôtel a étè édifiè de 1621 a 1160 environ en plusieurs campagnes de traveaux et en changeant plusieurs fois de mains avant d'étre acquis par Sully en 1634. Tallement des Reaux, dans ses Historiettes, a évoquè la silhoutte du vieux duc, "parè de chaines d'or et d'einsegnes en diamant" et s'arretant parfois pour baiser une mèdaille à l'effigie de son souverain dèfunt, Henri IV. On attribue les plans de l'édifice a Jean I Androuet du Cerceau, architecte du roi, maitre d'ouvre de l'Hôtel de Bretonvillers en 1637.



Sur le plan musical, le quartier du Marais peut s'enorgueillir d'avoir accueilli dans leur activité professionnelle les deux grands créateurs de la sonate française: Marc-Antoine Charpentier et François Couperin. Le premier fut appelé vers 1680 par la princesse de Guise à loger en son hôtel du Marais pour diriger sa musique "si bonne que celle de plusieurs musiciens n'en approchalt pas". En 1684, il accepta en outre la charge de maitre de musique chez les Jésuites de la rue Saint-Antoine. Le second est un "enfant du quartier": fils d'un organiste de Saint-Gervais dont il prit la succession, il passa toute sa jeunesse dans le vieux logement de fonction des organistes, rue du Moniceau Saint-Gervais.
C'est a Couperin que l'on attribue généralement la composition des premiéres sonates françaises sur modèle italien. Personne ne ssemble avoir remarqué jusqu'ici que Charpentier l'a sans aucun doute devancé. Cela est peut-étre dû au fait que l'admirable Sonate à huit dont nous donnons ici le premier enregistrement ne se trouve pas dans les vingt-huit volumes de Mélanges de la Bibliothèque Nationale, et ne figure pas dans le Catalogue de Claude Crussard. Copiée en parties séparées sans nom d0auteur (la mention "Charpentier" est d'une écriture nettement postérieure), elle ne présente pourtant aucune incertitude d'attribution tant son style est aisément identifiable, jusque dans les moindres détails. Les sonates de Couperin, en trio ou en quatuor, se réfèrent aux modèles de Corelli et les musicologues s'accordent à les dater au plus tôt de 1690. Celle de Charpentier, avec ses alternances d'ensembles polyphoniques ou homophones, de récotatifs et de danses semble la transposition sur le pian instrumental de la conception de l'oratorio de Carissimi - dont il était le disciple.
L'analogie avec les cantates datées et l'effectif utilisé nous permettent d'affirmer, avec une quasi-certitude, que Charpentier a écrit cette sonate pour la musique de la princesse de Guise, donc entre 1680 et 1688 et plus probablement vers 1683-1684, à la même époque que la cantate Orphée où Charpentier, comme dans la Sonate se plait à opposer les timbres des instruments "anciens" à ceux des instruments "modernes". On sera certainement frappé ici par òa très remarquable confrontation de la basse de viole et la basse de violon (violoncelle) ainsi que par l'intéressant rapprochement du clavecin et du théorbe (luth).
L'Apothéose de Lully reprsente la somme de l'expèrience de Couperin dans le domaine de la sonate. Publiée en 1725, entre l'Apothéose de Corelli et les Nations, elle appartient à l'époque où Couperin est parvenu à la plenitude de la maturité et a l'épanouissment complet de ses dons. Bien qu'écite en trio, elle appelle nommément l'orchestre par les termes "Premier (Deuxième) Dessus de Simphonie". Certains musicologues pensent d'ailleurs que le compositeur l'a extraite - comme on tire d'un ballet une suite d'orchestre - d'un divertissement composé sur le Triomphe de Mélophilètes de Bouret. Les indications instrumentales sont rares et il  reste à l'interprete moderne le soin - passionnant - de préciser l'orchestration. On distingue aisément trois parties dans cette longue oeuvre: tout d'abord une suite de ballet, très française, haute en couleur, ne dédaignant pas les effets pittoresques, puis une transition, Ouverture (qui se serait trouvée en tête du divertissement antérieur) suivie de deux airs dont une partie de violon est censée jouée par Lully, l'autre par Corelli, enfin une "Sonade" plus largement ouverte à l'influence italienne. L'ensemble constitue certainement un des sommets de la musique instrumentale française au XVIII siècle.
Jean-François PAILLARD