COLLECTION CHATEAUX ET CATHÉDRALES


1 LP - STE 50 186

EN LA CATHÉDRALE SAINT-SAVEUR  - AIX EN PROVENCE




LA FERVEUR SOLAIRE DES MUSICIENS PROVENÇAUX MAGNIFIE LA PRIÈRE DE LEUR FOI CHALEUREUSE ET ARDENTE





Guillaume Poitevin (1630-1706) - Attribuè à
Offertoire de la Messe de Morts --' --" A1
Joseph-François Salomon (1661-1731) Motet "Quis mihi dabit" --' --" A2
André Campra (1660-1744) Motet "In te Domine" --' --" A3

Motet "Quam dilecta" --' --" B1

Motet " Deus in adjutorium" --' --" B2



 
Jocelyne Chamonin, soprano Raphaël Perulli, viole da gambe
André Mallabrera, Rémy Corazza, ténors Jean-Pierre Laroque, basson
Georges Abdoun, baryton Marie-Claire Alain, orgue

Anne-Marie Beckensteiner, clavecin

Chorale Stephane Caillat / Stéphane Caillat, Direction
 






Luogo e data di registrazione
ottobre 1963

Registrazione: live / studio
studio

Producer / Engineer
H.-A. Durand / Daniel Madelaine

Edizione LP
Erato - STE 50 186 - (1 lp) - durata --' --" - (p) 196? - Analogico

Note
Image: Cloitre de la Cathédrale Saint-Sauveur.











Les origines de Saint-Sauveur d'Aix-en-Provence se placent à la fois dans la légende et dans l'histoire. Cette cathédrale, construite sur le tracé de òa voie Aurèlienne, est un trait d'union, un relais entre le monde romain et Louis XIV, un Te Deum y fut chanté pour célèbrer la ratification du traité des Pyrénées et l'accord sur la mariage du roi avec l'indante Marie-Thérése d'Espagne.
L'église possède trois nefs qui - de la voûte  romane aux arceaux gothiques, puis à l'ornamentation Renaissance - symbolisent le cheminement de la mystique. Et, dans la grande nef gothique, trone le célèbre triptyque du Buisson ardent de Nicolas Froment, oeuvre prestigieuse de l'école avignonnaise.
Sur les portes de la façade, les Prophétes et les Sibylles reçoivent les fidéles. Le cloitre est un ouvrage charmant du style romano-provençal. Et les chants de la maitrise, qui a formé le délicieux André Campra, semblent animer les pierres séculaires.
L'histoire de la ville d'Aix et le mervelleux chrétien resplendissent dans la cathédrale Saint-Sauveur d'Aix-en-Provence.
André Bouyala d'Arnaud



C'est en constatant l'éclat de centres musicaux tels que la cathédrale Saint-Sauver d'Aix-en-Provence, que l'on mesure à quel point la France de l'ancien régime était moins centralisée que celle d'aujourd'hui. Certes, la consécration sur un plan national et international venait encore de Paris - Académie Royale, et Concert Spirituel, au 18° siècle - mais l'activité musicale de qualité supérieure, composition, facture d'instrumentsm exécution, n'était pas le privilège de la seule capitale.
Aix-en-provence est un centre musical dès le XI siècle. A la mort de René d'Anjou (1480), et jusqu'au 17° siècle, la maitrise de Saint-Sauveur est l'une des plus brillantes de France. Au XVII, des maitres de chapelle comme Intermet, Gantez, et surtout Guillaume Poitevin (de 1667 à 1706) sont compositeurs, et attirent des élèves, venus de toute la zone méridionale. Saint-Sauveur sera doté d'orgues signées Pierre Marchand, puis Isnard. L'action de Guillaume Poitevin fut particulièrement féconde. Il eut pour disciples d'insignes musiciens: Esprit Blanchard, Laurent Belissen, Jean Gilles, et André Campra, entre autres.
En matière de composition comme de facture d'orgues, la Provence est alors un actif lieu d'échanges culturels franco-italiens, surtout sur le plan de la musique religieuse. La couleur italianisante des motets de Campra frappera les parisiens, et l'on verrà en lui un "séducteur", par rapport à l'art grandiose mais plus sévère de Delalande. Chez l'un ou l'autre des Provençaux - et même chez Salomon qui n'appartient pas à l'Ecole d'Aix - le style du motet fait penser parfois à Ingegneri (pour l'expressivité de la polyphonie), parfois à Monteverdi (pour l'originalité de la déclamation et des enchainements harmoniques).
L'offertoire O Domini, d'un Messe des Morts anonyme, a été attribué, non sans vraisemblance, à Guillaume Poitevin dont nous avons souligné la valeur et l'influence. Ecrit d'abord en imitations, puis en rècit harmonisé verticalement, ce motet vaut par l'expressive simplicité d'un style qui s'appuise sur une prosodie fort juste.
Provençal, mais non de formation aixoise, "Jean-François Salomon aix olse, Jean-François salomon (1661-1731) serait venu à Paris très Jeune. Gambiste célèbre, et claveciniste de la Reine, il écrit non seulement des motets, mais deux opéras (Médée, créèe en 1715, sera reprise jusqu'en 1749). Le Quis mihi dabit pour 3 voix et basse continue, apparait nettement marqué par l'esprit versaillais. Les lignes vocales sont abondamment ornées; lyrique ou dansant, d'un bel élan mélodique, son style nous achemine vers le motet d'allure concertante.
André Campra (1660-1744) est ici représenté par un groupe de trois motets, tirés des deux premiers des cinq Livres que publia Ballard, à Paris, autour de 1700. L'In Te Domine, à trois voix et basse continue est remarquable par sa "doucer" harmonique; mais le verset Respice vota montre que Campra est capable de retrouver la force expressive de l'ancien motet italien. La même formule, 3 voix et basse, préside au Quam Dilecta, moins vaste et moins concertant que celui de Rameau, mais caractérisé par son aisance mélodique, et la fluidité de son harmonie.
On retrouvera un ton exceptionnellement lyrique dans le quatrième verset du motet Deus in adjutorium (psaume 69), véritable arioso dramatique.
Dans tous ces "petits motets" (à effectifs réduits), la diversité de plans est ménagée par l'alternance des solistes (un, deux ou trois), et du "petit choeur".
Peut-étre est-ce ici le lieu de rappeler que la musique française classique avait pour premier idéal d'étre uneillustration sonore de la Parole, de donner un retentissement coloré à l'accentuation naturelle et à la signification du discours verbal. Cette musique n'est que secondairement une "construction en sol": les formes fixes, par exemple, en sont absentes (en dehors des morceaux chrégraphiques); ce qui ne veut pas dire qu'elle ne regulert pas une grande habilité. au contraire, le musicien se tient constamment das un assujettissement volontaire au texte: attitude qui, si elle lui fournit des idées d'ordre symbolique, descriptif, ou expressif, le retient de concevoir une oeuvre sur un plan uniquement et exclusivement musical. Les violonistes italiens et les organistes allemands sont évidemment aux antipodes d'une telle manière d'utiliser la musique. En somme, l'auditeur qui n'attacherait pas une importance extreme an texte - français ou latin - du motet, ou de l'opéra français classique, méconnaitrait une part essentielle de la signification de cette musique. a notre avis, il y a pas d'autre raison à l'oubli dans lequel était tombé ce réportoire: à la fin du XVIII siècle, le français a vu décliner son statut de langue internationale, et le latin a subi les mêmes vicissitudes, en France même, que la religion catholique.
Les Provençaux, quand ils "montèrent" à Paris et à Versailles, apparurent "italiens", dans la mesure même où ils se montralent moins sournis, en musique, à la primauté de l'éloquence verbale chantée.
Olivier Alain